Energies Renouvelables : L’inquiétant retard Français
À deux mois de la COP 21, la France est nettement à la traîne avec une part d’énergies renouvelables atteignant à peine les 20% de la consommation d’électricité nationale. L’objectif du 100% pour 2050 est bousculé alors que plusieurs initiatives locales poussent à l’optimisme.
Le compte à rebours est lancé. Le 30 novembre prochain, la 21e Conférence de l’Onu sur le cilmat lèvera son voile à Paris jusqu’au 11 décembre suivant. Le président Hollande a placé l’événement en référence de son quinquennat et espère, secrètement, qu’un accord historique entre les 195 dirigeants de la planète pourra être signé. Reste qu’à travers le regard de nos dirigeants, l’horizon français est, lui aussi, empli d’incertitude. Il y a quelques semaines, Pierre Cannet, le responsable du projet climat chez WWF France indiquait au Figaro que «l’urgence c’est maintenant».
Dans ce cadre, un cap à 100% d’énergies renouvelables d’ici à 2050 a été fixé. Pour Jean-François Julliard, le directeur général de Greenpeace France, «il n’y a pas d’autres alternatives». Plusieurs pays se sont déjà engagés dans ce sens, certains même comme le Costa Rica ou le Danemark avançant ce seuil minimum à 2035. L’Agence internationale de l’énergie (AIE) a estimé dans son dernier rapport que la part des énergies renouvelables dans le monde serait portée à 25% en 2020 contre 22% en 2013. Vendredi, c’était au tour de l’Inde d’annoncer un cap 40% pour fin 2030.
Dans une étude publiée il y a quelques semaines par l’ONG, la France est, elle, dessinée comme très en retard sur la question, le pays développant trois fois moins rapidement les énergies renouvelables que ses voisins européens comme l’Allemagne par exemple. Une tendance qui se calque également sur la part d’emplois créés, relativement minime jusqu’ici. En 2014, la part des renouvelables dans la consommation d’électricité française était estimée à 19,5%. Greenpeace est clair: si la France veut atteindre ses objectifs (un cap de 40% d’ici 2030), le pays doit aller deux fois plus vite.
Un impact économique et social
Dans son rapport, l’AIE estime à 205 milliards d’euros les investissements dans les énergies renouvelables chaque année d’ici 2020 dans le monde. En 2014, près de 310 milliards de dollars ont déjà été investis dans le secteur, soit quinze fois plus que les sommes injectées dans le nucléaire. L’effort est colossal et «le changement de modèle est indispensable», comme le détaille Sébastien Blavier, de Greenpeace France, qui explique que «ces investissements sont rentables sur le long terme grâce à d’importantes économies réalisées sur l’énergie et en carburant.»
Reste que la volonté française en la matière est toujours pointée du doigt. «Il n’y a aucune stratégie concernant une transition responsable vers les énergies renouvelables. On ne va pas assez vite et on s’entête avec un modèle ultra centralisé. Le tableau est suprenant avec des États schizophrènes qui font la promotion d’un nouveau système tout en soutenant l’ancien», explique Sébastien Blavier. Le constat est partagé par de nombreux acteurs du secteur, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) jugeant même en avril dernier possible une France avec une électicité 100% issue des énergies renouvelables.
Et un tel changement aurait, selon Greenpeace, des conséquences notables sur le plan économique et social. S’appuyant sur une étude publiée par le CIRED, l’ONG estime que d’ici 2030, la transition énergétique pourrait créer environ 230.000 emplois nets en France (100.000 actuellement contre 400.000 en Allemagne). Par exemple, à Saint-Georges-sur-Arnon (Indre), un parc de cinq éoliennes mis en service en 2009 a permis «la création d’une douzaine d’emplois fixes», selon le maire de la commune, Jacques Pallas (Front de Gauche). Il explique: «on avait un patrimoine exceptionnel à exploiter, je n’ai pas hésité. En tant qu’élu, j’ai toujours eu une sensibilité particulière autour de la nature, une fibre. On ne manque pas de projets et on est conforté par nos résultats.» Chaque année, le parc produit 24GWh d’énergie et les nombreuses retombées fiscales du projet ont permis à la mairie de Saint-Georges de développer de nombreux services publics et de générer 740.000 euros de bénéfices en quatre ans. En septembre, le Syndicat des énergies renouvelables (SER) a affirmé que la France avait franchi le cap des 10.000 MW éoliens raccordés. À l’horizon 2020, l’objectif est de grimper à 19.000 MW.
«On est pas là pour faire de l’argent»
Cette démarche devrait, et doit, avancer en accélérant. Selon l’AIE, le coût de l’éolien devrait même continuer de diminuer de 10%, alors qu’il a déjà reculé de 30% depuis 2010. Même chose du côté du solaire, où les coûts vont se contracter d’un quart par rapport à leur niveau actuel. «C’est une démarche globale à laquelle le citoyen doit être préparé, informé et investi», expose le mairie du Puy-Saint-André (Hautes-Alpes), Pierre Leroy, où un projet solaire citoyen a vu le jour il y a quatre ans. Le projet est articulé autour d’une société d’économie mixte, la SEVE (Soleil, Eau, Vent, Énergie), mêlant citoyens et collectivités. Aujourd’hui, la commune produit trois fois l’énergie qu’elle consomme grâce à l’installation de panneaux photovoltaïques sur le toit des bâtiments publics.
Selon, Pierre Leroy: «L’objectif du projet n’est pas de faire de l’argent amis de produire le plus possible d’énergie en utilisant les richesses de notre territoire. Le changement est total, avec ces panneaux mais ausssi la réduction de 50% de la consommation de l’eau potable sur la commune. On peut parler de la conquête d’une sobriété énergétique.» En 2015, le chiffre d’affaires de la société est estimé à 140.000 euros avec des habitants directement actionnaires. Une première en France qui donne des idées. Le problème est pour le moment encore ancré. Chaque année, les subventions publiques atteignent encore 550 milliards de dollars dans le monde pour les énergies fossiles. Le fossé avec les renouvelables est encore grand, et la France est encore attendue sur ces actions.
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